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La vie dans le désert

Marrakech (2)

La promenade dans la médina, c'est autre chose que faire ses courses à Auchan. Des milliers de plats à tajine, de lampes, de babouches, de plateaux en laiton, de tapis – ah! les tapis – tous pareils, tous différents, chaque objet étant le fruit d'heures de jours ou de mois de travail, un travail humain avec des mains et des yeux fatigués,  des millions d'années de vie laborieuse exposées et matérialisées jour et nuit dans un entrelacement de ruelles couvertes. Aux abords de la place, on peut monter sur une terrasse pour boire un verre et observer enfin le paysage. Les fourmis sur la place Jama El Fna, l'immense minaret de la Koutoubia, et surtout, surtout les montagnes. Le Moyen Atlas au Nord, le Haut Atlas au sud, entouré de sombres nuages d'orage. Marrakech a ceci de particulier que la montagne est proche – on sent le vent frais qui s'écoule le soir des vallées – et qu'on ne la voit quasiment jamais, à moins d'avoir suffisamment de champ pour que l'œil s'accroche aux pentes neigeuses.

Le soir la place s'anime avec plus de vigueur et les restaurants en plein air s'installent, fournissant au badaud les couleurs et le parfum qui mettront en marche ses glandes salivaires et initieront des mécanismes micro-économiques. Mon choix s'est porté – un peu forcé je dois dire car mes compagnons algériens sont déjà attablés – sur de superbes abats : langue de bœuf  (la vache est-elle folle), pis de vache, le tout sur du pain, avec du sel au piment … Plus loin, j'observe les poissons frits et les calamars. J'ai peut-être raté une intoxication alimentaire et absorbé le prion qui me transformera en légume le moment venu…

 

Autre soir, autre ambiance, nous dînons dans un ryad. Le ryad est au Maroc ce que le bed and breakfast est à la campagne anglaise1 . Pour faire un bon repas dans un bon ryad, il faut avant tout un vieux ryad – seules les imitations de très grand luxe sont admises -, des musiciens berbères à l'entrée, de bons convives, une nourriture divine – mais terriblement roborative - et surtout une danseuse au milieu de repas dont la fonction première est d'exciter nos sens endormis par l'excès de pastilla. En quelque sorte le trou marocain – veuillez excuser la vulgarité de l'expression mais soit dit en passant le calva me donne des brûlures d'estomac, ça tombe bien.

La danseuse est une apparition, elle brille de mille feux, elle attise la convoitise, elle s'échappe, elle oublie son foulard, elle revient le chercher, elle repart. Elle a envoûté la tablée qui n'a eu d'yeux que pour son nombril, sa poitrine généreuse, son ventre rond, ses brillants, son sourire, son regard incandescent.

 

1 Cette comparaison est une faute de goût, je l'admets.

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